
Le Pape répondait au départ à une invitation à célébrer le 600ème anniversaire de l’Université Catholique de Louvain, l’une des plus anciennes d’Europe, fondée en 1425. Cette université est désormais scindée en deux parties, la KUL (Katholieke Universiteit Leuven) en région flamande, et l’Université Catholique de Louvain, en région francophone (Louvain-laNeuve), après la régionalisation de 1962. Voici en quelques lignes le détail de ce séjour, et les accents qui le soulignèrent.
Jeudi 26 septembre
Au soir, l’avion du Pape se pose sous une pluie battante et des bourrasques de vent, et est accueilli chaleureusement par une délégation restreinte de responsables ecclésiastiques et civils, de militaires et de journalistes, ainsi que par le roi Philippe et la reine Mathilde des belges. Une chorale d’enfants lui offrit une charmante aubade, qu’il apprécia beaucoup.
Vendredi 27 septembre
Matin
Le pape fut reçu au château de Laeken par le roi et la reine, comme chef de l’Etat du Vatican. Il s’adressa dans un discours à la Nation aux membres des corps constitués, de l’Église catholique et des autres cultes reconnu en Belgique, de la société civile et du corps diplomatique. Il y insista sur le rôle et la place de la Belgique au sein de la communauté européenne, et eut des paroles fortes à propos des abus sexuels dans l’Église: Ceci est la honte ! La honte que nous devons tous prendre en mains aujourd’hui, demander pardon et résoudre le problème : la honte des abus, des abus sur mineurs (…). Ceci est notre honte et notre humiliation.
Ensuite, il alla faire une visite imprévue dans une maison de retraite gérée par les petites sœurs des pauvres au centre de Bruxelles, exprimant ainsi sa sensibilité au sort des personnes âgées, et dépendantes.

Après-midi
Le Pape s’est rendu à la Katholieke Universiteit Leuven, pour le 600ème anniversaire de sa fondation, où il s’est entretenu avec les Professeurs et les étudiants. Il a encouragé les universitaires « à être les protagonistes dans la création d’une culture d’inclusion, de compassion, d’attention aux plus faibles et aux grands défis du monde ».
Soir
Le Pape rencontra une quinzaine de personnes victimes d’abus sexuels de la part d’ecclésiastiques.
Samedi 28 septembre
Matin
Le Pape s’est rendu, de façon imprévue une nouvelle fois, à un petit déjeuner et un échange fraternel avec des SDF à la paroisse de saint Gilles.
Ensuite, eut lieu la rencontre officielle avec des acteurs pastoraux dans divers domaines à la Basilique de Koekelberg, échange de questions-réponses. Parmi ces personnes, il y avait un professeur de théologie, un aumônier de prison, une religieuse de Tibériade œuvrant avec les plus pauvres, entre autres. Le pape leur donna des pistes de réflexion autour de trois thèmes : l’évangélisation, la joie, et la miséricorde. Il dira : « nous sommes passés d’un christianisme installé dans un cadre social accueillant à un christianisme de minorité, ou plutôt de témoignage », les invitant à avoir le courage d’une conversion ecclésiale ». Il parla de
l’importance du pardon : « Jésus nous montre que Dieu ne se tient pas à l’écart de nos blessures, et de nos impuretés. Il sait que nous pouvons tous faire des erreurs, mais personne n’est une erreur. »
Puis il s’est rendu, de manière imprévue- ce qui déclencha une vive polémique – dans la crypte royale de l’église de Laeken, sur la tombe du roi Baudouin. Il rappela le courage du roi défunt qui refusa de voter la loi sur l’avortement, avant de demander plus tard – lors de la messe de clôture – l’ouverture, pour cette raison précise, de son procès en béatification. Dans l’avion qui le ramenait à Rome, il ira d’ailleurs jusqu’à qualifier les médecins pratiquant des
avortements de « tueurs à gages » (sic !). Le propos sera répété deux fois…
Après-midi
Le pape s’est rendu à L’Université Catholique de Louvain-la-Neuve, où il prononça également un discours remarqué -et qui fut l’objet d’une nouvelle polémique – à propos du statut de la femme dans l’Église et dans la société, même si son discours souligna une convergence de fond sur le thème du changement climatique, dans l’esprit de « laudato si ». Le même soir, il fit ensuite une apparition surprise au « Hope Happening », rencontre d’une quarantaine d’association de jeunes chrétiens autour d’un concert, sorte de festival de la jeunesse de Bruxelles, où il fut accueilli comme une véritable rock star.
Dimanche 29 septembre
À 10 heures, le pape présida la messe de clôture en présence d’une foule enthousiaste de 35000 fidèles au stade Roi Baudouin. Au cours de la célébration, le pape procéda à la béatification d’Anne de Jésus, carmélite compagne de Thérèse d’Avila, et qui fonda entre autres le carmel de Bruxelles (un miracle lui fut attribué le 14 décembre 2023). Dans son homélie, il a reparlé des abus sexuels dans l’Église, notamment par ces mots : « Il y a de la place dans l’Église pour tous, tous, tous, mais nous serons tous jugés ; il n’y a pas de place pour l’abus, pour la couverture de l’abus ; je le demande à chacun : ne couvrez pas les abus ! Je demande
aux évêques : ne couvrez pas les abus ! ». C’est aussi à ce moment que le pape déclara ouvrir le procès en béatification du défunt roi Baudouin.
En conclusion
s’il fallait résumer en quelques lignes la visite du pape François en Belgique du 26 au 29 septembre dernier, on pourrait la qualifier de contrastée. D’une part,
largement, la ferveur, la joie, l’enthousiasme, et ce dès son arrivée sur le territoire du Royaume, et au cours des diverses rencontres officielles ou informelles vécues, jusqu’à la messe de clôture du 29 en présence de 35000 personnes enthousiastes. D’autres part, l’émoi de nombre de personnes, aussi dans la communauté catholique, face à des propos jugés choquants, passéistes, ou réducteurs. À suivre avec l’ouverture de la nouvelle session du synode sur la synodalité…
Sœur Gabrielle, octobre 2024